Numérique / Territoires

Chiffres du FttH en France : une croissance trop molle Juin 2017

Trimestre après trimestre, les données de l’observatoire du haut et du très haut débit de l’ARCEP montrent une certaine croissance des constructions de prises et de la commercialisation, mais encore loin de suffire à tenir les objectifs du Plan France THD. La dernière publication de l’observatoire de l’Agence du Numérique montre également les politiques d’écrémage des prises les plus rentables par les opérateurs privés.

Sur les « engagements » des opérateurs privés d’avoir fini la zone AMII en 2020, cela semble mal parti : à moins de 4 ans de l’échéance, plus des ¾ des prises restent à construire. Les prévisions de l’Agence du numérique montrent même qu’en comptant sur une accélération,  plus de 3 millions de prises seraient à réaliser après 2020 ! Comme il s’agit des plus coûteuses, le doute s’installe chez les élus locaux et la colère pourrait monter pour les entreprises et particuliers concernés, souvent déjà mal desservis en cuivre.

S’agissant des 3 400 communes de la zone AMII, le dernier pointage publié par l’Agence du Numérique (données fin 2016), seules 652 étaient commencées (dont 26 traitées à moins de 1% et 480 traitées à moins de 50%). S’ils construisent un peu davantage chaque année, les opérateurs privés poursuivent aussi clairement une politique d’écrémage. Plus de 5 millions de logements et de locaux professionnels sont gelés : l’opérateur qui a déployé la partie du réseau la plus rentable a laissé la moitié des prises de côté.

Le cap des 1 000 communes en déploiement à l’initiative des collectivités vient d’être franchi, mais elles sont à la peine. Les prises que les collectivités ont à construire sont en moyenne 3,5 fois plus longues et coûteuses que celles de la zone privée. Vu les conditions actuelles d’utilisation du génie civil d’Orange, il faudra que l’ARCEP accentue fortement sa pression pour que le rythme décolle. Cependant, les collectivités ne pratiquent pas l’écrémage des prises les plus faciles, mais cherchent d’emblée une couverture effective. Si l’on considère le « TOP 50 » du meilleur taux de prises raccordables, 48 communes sont fibrées par le secteur public contre 2 par le privé. Même en Zone très dense, aucune commune n’est couverte à plus de 90%.

Au total, le volume annuel de construction passe de 2,1 à 2,2 millions de prises. Il en faudrait une moyenne de 3,2 pour tenir l’objectif du Plan en 2022 ; en restant au rythme actuel, nous en serions à 12,8 millions au lieu de 26,6 à cette échéance. La question n’est pas de savoir si le verre est à moitié plein ou vide, mais à quelle vitesse il peut se remplir.

Côté commercial, le succès s’amorce, avec un taux de pénétration qui atteint maintenant 30%. Cette moyenne cache des disparités, car le taux de mutualisation (présence de deux opérateurs au point de mutualisation) varie de 70% pour la zone moins dense privée à 26% dans la zone publique, du fait des stratégies des deux principaux opérateurs verticalement intégrés. Quant à la présence de 3 opérateurs, elle atteint 35% (+ 4 points) pour le privé, et n’est même plus publiée sur le graphique de l’ARCEP s’agissant des déploiements publics.

Le nouveau gouvernement doit se saisir d’urgence de ces questions. Le Plan France Très haut débit a créé de bonnes bases, il faut vite construire sur elles. Ainsi que le rappelait Sébastien Soriano, président de l’ARCEP, au colloque de l’AVICCA du 23 mai, la France est classée 26e dans une Europe qui compte 28 pays et bientôt 27…

 

Paris, le 7 juin 2016

Patrick CHAIZE
Président de l'AVICCA

 

 

Sources :

  • observatoire ARCEP
  • observatoire Agence du Numérique