Numérique / Territoires

Réponse de l'Avicca à la consultation publique de l'Arcep relative à la mise en oeuvre de l'obligation de complétude des déploiements des réseaux FTTH mutualisés pour l'habitat isolé Mai 2012

Les territoires ruraux sont à la fois ceux qui souffrent aujourd’hui des plus mauvais débits ADSL en général et qui ont le plus besoin de « mettre fin à la tyrannie de la distance » pour accéder aux services publics et privés grâce aux technologies de la communication.

Face à cette exigence, la réalité des coûts de déploiement du FTTH s’impose également. De multiples études ont montré l’envolée des linéaires pour les quelques pourcents d’habitations les plus éloignées. A titre d’exemple, les études menées sur la région PACA indiquent que les 61 000 prises d’habitat dispersé coûteraient autant que les 600 000 prises en habitat regroupé, et ceci hors zone AMII des principales agglomérations. Or la décision de l’ARCEP sur la zone moins dense impose une complétude de la couverture, jusqu’à proximité immédiate des logements ou locaux, dans un délai maximal de cinq ans à partir du moment où la desserte d’une zone arrière de point de mutualisation a été commencée.

Bien évidemment, les opérateurs privés ne s’intéressent pas aux zones rurales en général, et encore moins à l’habitat isolé. Il revient aux politiques publiques de savoir où mettre le curseur pour arbitrer entre les exigences d’équité de traitement et les possibilités budgétaires. C’est l’exercice difficile auquel se livrent aussi bien l’Etat, que les collectivités, notamment dans les SDTAN.

Cependant, il existe aujourd’hui un hiatus entre l’effet de levier que recherche l’Etat, via un plafond d’aide du FSN à la prise faible, et une obligation réglementaire de complétude pour l’habitat isolé qui enchérit le coût moyen à la prise, déjà élevé en zone rurale, dans des proportions très importantes. De même l’Etat appuie financièrement des recherches pour le satellite qui visent principalement l’habitat isolé. La vision publique nationale est clairement celle d’une réalisation différée de l’habitat isolé ; il est peu probable que les contraintes budgétaires modifient substantiellement cette vision pour un prochain gouvernement, même si l’ensemble du Programme national Très haut débit s’accélère.

On remarquera également que l’Etat et les collectivités proposent des solutions alternatives là où le FTTH ne peut être installé (hertzien terrestre, montée en débit sur cuivre, satellite ...). Il s’agit bien d’articuler des solutions technico-économiques en fonction de réalités de terrain et d’un changement par étapes. A contrario, là où les opérateurs privés ne construisent pas de FTTH, ils ne proposent pas non plus de solutions de montée en débit.

L’obligation de raccorder l’habitat isolé dans un délai court (à l’échelle de temps du fibrage des zones rurales) revient à enchérir le coût de desserte d’une zone arrière de point de mutualisation à un point tel qu’elle peut aboutir à deux impasses :

  • un découpage en zones arrières aberrant (à l’image de l’exemple 2 de la consultation)
  • la non réalisation d’une zone arrière dans son ensemble pour ne pas mettre le doigt dans l’engrenage d’une obligation qui entraîne trop loin dans les besoins de financement

Sur le temps long, nous pouvons espérer qu’un mécanisme de type « service universel » permette, comme actuellement pour le cuivre, une péréquation des coûts sur une très large échelle. Sur un temps court, l’obligation ne pèse que sur les collectivités les plus rurales.

Aussi l'AVICCA :

  • souhaite des obligations de complétude qui soient proportionnées avec les difficultés de réalisation, afin de permettre le déploiement de la fibre en milieu rural, et éviter d’écrémer davantage les territoires urbains ;
  • demande une articulation forte entre la réglementation et les politiques publiques pour le Très haut débit et la montée en débit ;
  • propose un régime provisoire permettant de gérer les exceptions, afin de bénéficier d’un retour d’expérience ;
  • demande un cadre plus précis afin de s’assurer que les constructions nouvelles soient desservies, y compris dans la zone très dense.