Fiber to the distribution point (FTTdp) : ami ou ennemi du FTTH ? Juin 2013
Plusieurs équipementiers (Huaweï, ZTE, Alcatel, Aethra-Lantiq, ADTRAN...) proposent des dispositifs permettant d'utiliser la partie terminale du réseau cuivre existant (paire torsadée ou câble coaxial) en la raccordant à la fibre en un point de distribution. Les débits théoriques annoncés vont de quelques dizaines à quelques centaines de Mbits/s suivant les longueurs. Diverses architectures sont possibles :
- en aval du point de concentration (en général 8 lignes en cuivre), avec un équipement par ligne ;
- au niveau du point de concentration, voire plus haut dans le réseau, sur un point à créer ou au sous-répartiteur. Typiquement, l'équipement prototypé aujourd'hui est attaqué en amont par du G-PON, et il communique avec la box en VDSL2 (30.a). Il est téléalimenté via l'installation de l'abonné.
L'intérêt potentiel de ce dispositif est de ne pas réaliser le raccordement en fibre chez l'abonné, qui est complexe (rendez-vous, intervention sans dégradation...) et coûteux dans certaines configurations (raccordement des pavillons par exemple). L'objectif des équipementiers est de fournir ces dispositifs dans une fourchette de 100 à 150€ (plus pose !).
Cependant, le FTTdp pose de lourdes questions :
- industrielles et politiques : le chantier de la fibre optique est souvent mis en avant parce qu'il s'agit d'emploi régional et non délocalisable. Ce ne sera pas du tout le cas avec ces équipements ;
- techniques : comment assurer une co-existence sur un réseau mutualisé ? Chaque équipement est "propriétaire", mais il vient s'enchâsser dans un ensemble et pose des questions de provisioning, de supervision etc. Cela n'est déjà pas simple pour un opérateur unique. Quid si un abonné change d'opérateur ? Par ailleurs, quels risques d'interférences entre paires torsadées voisines, ou de perturbations par l'alimentation électrique ?
- économiques : s'agissant d'équipements actifs, ils n'ont pas une durée de vie technique aussi longue qu'un câble en fibre, et devront aussi évoluer avec les technologies (évolutions du PON ou point à point en amont, G.fast en aval...) ;
- régulation : quels principes adopter entre la régulation asymétrique du cuivre et la régulation symétrique du FTTH ?
L'interrogation se pose aussi pour l'aménagement du territoire : s'agit-il simplement de diminuer les coûts des raccordements les plus chers ou complexes (pavillons, foyers sans internet pour pouvoir éteindre le réseau cuivre...) ? Ou est-ce une menace supplémentaire pour un déploiement FTTH, en rendant possible une évolution par opportunités du réseau cuivre, sans vision de long terme, par création de nouveaux noeuds de réseau, dans la rue ou au pied des immeubles ? La technique est une chose, l'encadrement de son emploi et le jeu d'acteurs en sont d'autres.
L'intérêt potentiel du FTTdp, abaisser le coût du déploiement du très haut débit est donc à relativiser. Par ailleurs, le chemin pour une éventuelle autorisation d'employer ces dispositifs sur le réseau régulé de France Telecom n'est pas encore tracé. Des travaux exploratoires ont commencé sous l'égide de l'ARCEP, avec les parties concernées ; ils seront synthétisés à la fin de l'année. Aucune date n'est fixée pour un éventuel emploi de ces équipements sur le réseau de l'opérateur historique.