Numérique / Territoires

Réorganisation de la TNT : de la place pour un monopole local Août 2005

Le 19 juillet, le CSA a décidé de modifier les principes de gestion de la ressource radioélectrique pour la TNT, sans passer par une concertation ; objectifs poursuivis : trouver un minimum de place pour la télévision locale et la haute définition et, sans doute, affecter le multiplex R5 à la télévision sur mobile... Indirectement, une réorganisation offre aussi plus de chance d'étendre la TNT gratuite dans les zones frontalières. Mais cette « avancée » pour la télévision locale est le fruit d'une reculade : un pas en avant, après trois pas en arrière sur le R5. Et elle peut être lourde de conséquences.

Chaînes en plus ou en mieux

Plusieurs formats et normes sont ou seront utilisés par la TNT :

  • MPEG-2 SD : définition standard pour les services gratuits
  • MPEG-4 SD : définition standard pour les services payants
  • MPEG-4 SD avec tranches en clair en MPEG-2 : pour Canal+ par ex
  • MPEG-4 HD : haute définition
  • MPEG-4 spécifique à la télévision mobile

Le choix du MPEG-4 pour les chaînes payantes permet de gagner 30 à 50% du débit nécessaire en comprimant mieux le signal. Conséquence : un multiplex qui contient des chaînes payantes permet d'accueillir plus que les 6 chaînes initialement prévues. Combien exactement ? Cela dépend de la qualité des décodeurs, mais aussi du type de programmes (les images de sport sont très consommatrices par exemple), du mode de multiplexage, de la qualité du son, de l'existence de décrochages locaux, des données associées etc. Pour connaître les conséquences complètes de ce gain potentiel, le CSA a prévu une concertation avec les acteurs afin de connaître leurs besoins.

Cette libération de capacité permettra « à terme » de diffuser plus de chaînes et/ou de diffuser des chaînes en haute définition.

Le CSA a « d'ores et déjà » retenu le principe d'affecter le gain en premier lieu à une télévision locale par site d'émission, en deuxième lieu à la migration en haute définition de la télévision payante (à commencer sans doute par Canal+ et TPS ; de toute façon il sera difficile d'aller au delà).

Un peu d'organisation pour étendre la diffusion

En complément, le CSA a regroupé les chaînes issues de la nouvelle vague d'autorisation pour rationaliser le système. Les nouvelles chaînes gratuites privées ont été regroupées avec les anciennes sur le R2, et les payantes sur le R3, avec leur navire amiral Canal+

Cet effort pourrait se poursuivre jusqu'à réorganiser R4 et R6, la loi ayant été modifiée pour que le CSA ait le pouvoir de cette rationalisation.

Un des enjeux de la réorganisation, c'est de concentrer les chaînes gratuites sur 3 multiplex au lieu de 4 actuellement, ce qui permettra plus facilement d'étendre la TNT gratuite, en ayant moins de fréquences à trouver. Cette question est particulièrement sensible pour les zones frontalières.

Monopole et télévision locale

En affectant un canal à la télévision locale, le CSA dévoile son abandon probable d'affectation des trois canaux du multiplex R5 prévus à cet usage. Il autorise par ailleurs de nombreuses expérimentations de télévision sur mobile sur cette fréquence R5 numérisée. Certains se réjouiront : un canal pour le local, c'est mieux que rien, comme actuellement. Mais c'est très différent de trois : cela entérine définitivement l'absence de pluralisme, dont le CSA est pourtant le garant. Ainsi TV 10 Angers, chaîne publique retoquée par le CSA au profit du projet de la PQR pour une fréquence analogique, aura-t-elle une place en numérique, ou bien, comme c'est probable, le CSA affectera-t-il ce canal numérique au projet qu'il a aussi choisi pour l'analogique ? En hertzien, mode de réception dominant en France, n'y aura-t-il pour longtemps qu'une seule chaîne privée, filiale du titre de presse dominant sur une grande ville comme Lyon ? Et pourtant la loi a prévu que le CSA favorise la reprise en TNT des chaînes locales du câble. La télévision associative est-elle aussi définitivement passée aux oubliettes ? Derrière un arbitrage « technique », les conséquences sont lourdes.

Seule porte de sortie : existe-t-il encore d'autres fréquences locales numérisables ? C'est le fruit d'une étude menée pour le compte du CSA sur une poignée de sites. Quels en seront les résultats ? Seront-ils extrapolables ?

Dans cette attente, il ne faut pas lâcher le multiplex R5.