Veut-on vraiment accélérer la digitalisation des entreprises ? Septembre 2019
C’est un paradoxe : la France est en même temps leader en matière de couverture fibre (3ème en Europe) et parmi les derniers en matière de transformation numérique des entreprises (18ème [1] ).
Les PME ont besoin d'un écosystème pour leur digitalisation
La transformation numérique des entreprises nécessite de combiner informatique, telecoms et cloud : sécurité des données, développement du télétravail, liaisons multisites, visioconférences… Offres et besoins évoluent vite, et les TPE/PME n’ont ni le temps ni les compétences pour gérer cela en interne. Elles doivent pouvoir compter sur des ensembliers, qui savent pour elles assembler, interfacer et mettre à jour un large panel de produits numériques qui leur sont externalisés et qui servent au bon fonctionnement quotidien des entreprises.
Cet écosystème de sociétés de proximité compte environ 1 300 opérateurs de services numériques répartis sur tout le territoire. Leur présence locale et leur diversité sont gages de concurrence et d’innovation, dans un secteur très évolutif. Certaines de ces entreprises possèdent leurs propres « cœurs de réseaux », mais la plupart s’appuie sur des opérateurs qualifiés d’agrégateurs (de liens télécoms). In fine, uniquement grâce à la possibilité d’accéder aux offres du marché de gros, ils utilisent tous les infrastructures essentielles qu’il n’est pas question de répliquer (les réseaux cuivre et fibre).
Les réseaux d'initiative publique, terreau de l'écosystème
Ces opérateurs se sont pour la plupart développés grâce aux RIP, les réseaux d’initiative publique créés à la demande des collectivités pour développer les services offerts et apporter la concurrence entre les acteurs télécoms. Les RIP s’interdisent de vendre sur le marché de détail, c’est-à-dire de rentrer en concurrence avec leurs clients directs (les opérateurs de service numérique et les agrégateurs). Ce principe a poussé les RIP à développer des offres qui correspondent parfaitement aux besoins du marché de gros : neutres, ouvertes et activées. Les résultats sont clairs : les RIP, qui ne sont pourtant disponibles que pour une minorité des entreprises, représentent selon l’ARCEP 50% des liens en fibre optique vendus sur le marché de gros pour les professionnels [2] . Au-delà de favoriser la concurrence [3] et la diversité parmi les opérateurs et donc d’accélérer la transition numérique des entreprises, le modèle des RIP a un impact positif sur l’économie et l’emploi [4] . Le modèle « wholesale only » a même été promu et repris par la Commission européenne [5] dans son nouveau code des communications électroniques. L’OCDE dans son rapport publié le 10 septembre, l’identifie comme un des modèles d’avenir des opérateurs [6] .
Agir pour pérenniser un opérateur de gros national et neutre
Si le modèle d’offreurs de gros non présents sur le marché de détail produit des résultats positifs pour les entreprises dans les RIP, sa reprise en zone d’initiative privée devrait pouvoir produire les mêmes effets. C’était l’objectif visé par KOSC lors de sa constitution - fondée sur la décision de cession du réseau Completel imposée par l’Autorité de la concurrence à SFR en 2014 et favorisée par l’évolution en 2017 des conditions de régulation prévues par l’ARCEP – pour faire bouger les lignes d’un marché considéré, y compris par le régulateur, comme non suffisamment concurrentiel.
KOSC est aujourd’hui à un tournant de son histoire, mais ne nous y trompons pas, ce n’est pas son seul destin qui se joue ici : la recomposition de son capital déterminera la poursuite de l’évolution ou le repli de l’animation concurrentielle entamée dans les zones d’initiative privée. La conséquence du dysfonctionnement du marché professionnel - qui représente 10 milliards d’euros par an, soit 1/3 de l’ensemble du marché des télécoms - c’est une transformation des entreprises ralentie : pas d’usage numérique avancé sans accès télécom ouvert.
Le modèle d’opérateur de gros neutre a fait ses preuves. Le marché télécom des entreprises est-il condamné à rester insuffisamment concurrentiel sur une large partie du territoire ? La France va-t-elle rester en queue de peloton en Europe en matière de transformation numérique des entreprises ? L’Avicca, le CDRT et InfraNum se rassemblent pour que ces questions, lourdes de conséquences, soient bien mises en balance au plus haut niveau lors des arbitrages à venir.
Paris, le 12 septembre 2019
Patrick Chaize, Président de l’AVICCA - www.avicca.org
Etienne Dugas, Président d’InfraNum - www.infranum.fr
Laurent Silvestri, Président du CDRT - https://cdrt.fr
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[1] Commission Européenne, Digital scoreboard index, 2017.
[2] Bilan et perspectives ARCEP, juillet 2019.
[3] Les RIP à destination des professionnels peuvent compter plusieurs dizaines d’opérateurs clients différents. A titre d’illustration, celui de Nantes Métropole, sur un périmètre géographique restreint, en comptait déjà plus de 60 dès la 4ème année de fonctionnement.
[4] Taux de chômage à 9,9% pour les zones d’emploi traversées par un RIP contre 10,55% ailleurs, taux de création d’entreprise supérieur d’environ 10% (Observatoire Caisse des Dépots, FIRIP devenue InfraNum, Idate/Digiworld 2017).
[5] Opérateurs « wholesale only » du nouveau « paquet télécoms » dont la directive doit être retranscrite en droit français prochainement.
[6] Kosc est cité en exemple dans ce rapport : (https://www.oecd-ilibrary.org/science-and-technology/the-operators-and-their-future_60c93aa7-en).
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Créée en 1986, l’Avicca fédère les collectivités françaises qui agissent pour l’aménagement numérique des territoires, afin de mutualiser les expériences et peser sur le contexte national.
Plus de 30 ans d’expérience lui donnent un recul irremplaçable dans les analyses, en particulier sur les questions du jeu des acteurs, de la réglementation, des stratégies et des évolutions technologiques.
L’Avicca est membre des instances suivantes : Comité de Concertation France THD, Comité de Concertation France Mobile, Comité de l’interconnexion et de l’accès (Arcep), Comité d’experts cuivre (Arcep), Comité d’experts fibre (Arcep) et du Comité opérationnel des RIP (Agence du Numérique). Elle est également partenaire de locales TV.L’association représente ainsi plus de 230 adhérents, villes, intercommunalités, départements, régions, syndicats mixtes, syndicats d’énergie, régies, SPL, de métropole et d’Outre-Mer.
Créée le 6 décembre 2012 pour accompagner le Plan France Très Haut Débit, la fédération InfraNum (ex-FIRIP), regroupe plus de 200 entreprises représentatives de l’ensemble des métiers de la filière des Infrastructures du numérique (bureaux d’études, opérateurs, intégrateurs, équipementiers, fournisseurs de services, etc.).
Partenaire industriel de tous les territoires connectés ou à connecter, elle soutient l’aménagement numérique et le développement des usages sur les territoires en misant sur une infrastructure neutre, ouverte et mutualisée.
Interlocuteur privilégié du gouvernement, des principaux organes de décision français dédiés au numérique (Agence du numérique, ARCEP, Commission supérieure du numérique et des postes) et des collectivités, elle favorise les partenariats entre acteurs publics et privés et avec l’ensemble des acteurs institutionnels et techniques.
Parmi ses thèmes d’actions prioritaires, au-delà du déploiement du THD : les smart territoires et la gouvernance de la donnée ; l’emploi et la promotion des métiers du déploiement de la fibre ; la valorisation et la promotion à l’étranger du modèle des réseaux à la française.
En tant que membre d’Objectif Fibre, collectif dont le but est d’éditer des guides pratiques et d’améliorer la formation aux métiers du THD, InfraNum est en charge de la mise en place de la communication liée à l’EDEC signé avec l’Etat au sujet de l’emploi et la formation dans la filière de la fibre optique.
InfraNum a oeuvré collectivement, aux côtés des fédérations AFNUM, FFT et Sycabel, pour la création d’un Comité Stratégique de Filière « Infrastructures du numérique », annoncé le 22 novembre 2018 par le gouvernement.
A propos du CDRT : www.cdrt.fr - Contact presse : Laurent SILVESTRI (06 64 68 62 80)
Le CDRT est un club d’affaires, créé en 2012, qui a pour objectif de réunir les acteurs de la convergence informatique et télécoms, faciliter le networking et apporter un éclairage d’experts sur les sujets d’actualités. Il permet d'échanger et partager des expériences avec l'ensemble des acteurs de l'écosystème informatique et télécoms, créer des synergies Business en toute bienveillance, anticiper les évolutions du marché et des usages et participer à la promotion des Communications Unifiées. Le CDRT compte 190 membres dirigeants, représentant les différents acteurs de l’écosystème des Communications Unifiées, intégrateurs, opérateurs, éditeurs, équipementiers et ESN.