TRIP d'automne 2020 : Quels enjeux territoriaux pour la transformation numérique ? Janvier 2021
Innover, mutualiser, sécuriser, inclure et mieux gouverner (les données) sont les passages obligés pour transformer les organisations territoriales grâce au numérique.
Innovation et patrimoine informatique
« Au sein de la puissance publique, il y a un manque de culture de l’innovation et du risque. Quand il y a un chef de projet, sa hiérarchie, des services juridiques, des services financiers, etc. le cumul invite chacun à surévaluer progressivement le risque lié à cette innovation et cela peut finalement conduire à l’inaction », prévient Florent Boithias. Le responsable de la mission Villes et territoires intelligents du Cerema a rappelé les freins et les leviers au déploiement de l’innovation dans les collectivités, avec un zoom sur l’internet des objets. Il a notamment insisté sur les aspects réglementaires permettant de contractualiser avec des entreprises innovantes afin de faciliter le dialogue entre public et privé pour (enfin) passer à l’action !
« Aujourd’hui, Gironde Numérique a deux casquettes : la première, la plus connue, pour le déploiement de la fibre optique ; la seconde, moins connue, pour la mutualisation des services numériques pour les collectivités qui n’ont pas de service informatique », a témoigné Yann Breton. Le directeur du syndicat mixte a voulu « parler du quotidien des territoires en matière de transformation numérique et notamment des territoires ruraux » : des obligations réglementaires qui explosent, des systèmes d’information de plus en plus en complexes et pas ou peu d’informaticiens pour accompagner ces changements dans le secteur public. Sa méthode pour y remédier ? Un programme en quatre étapes : sécurisation du patrimoine numérique, déploiement d’un socle minimum d’outils, sorte de « kit de survie » informatique, accompagnement humain et invitation à plus de sobriété : « ne faire que le strict nécessaire car il ne sert à rien d’ajouter le numérique au numérique ».
Médiation et désilotage des données
L’inclusion relève aussi de la survie numérique pour les agents comme pour les administrés. D’autant que « le besoin d’accompagnement des Drômois a été accentué par la crise sanitaire », a constaté Nathalie Zammit-Helmer. La vice-présidente Territoires numériques et Innovation du conseil départemental de la Drôme adosse sa politique volontariste de médiation aux dispositifs nationaux pilote PIX (formation) et Aidants Connect. Après l’expérimentation des chèques #APTIC puis l’appel à projets Pass, le département participe aussi au TANI et Hub HINAURA. Résultats : « 20 espaces publics numériques sont accompagnés par le département à hauteur de 350 000 euros en investissement et 870 000 euros en fonctionnement ; 28 animateurs sont en poste actuellement, certains depuis 2015 ; il y a un ½ ETP au département pour la coordination et l’animation du réseau ; environ 33 heures d’animation hebdomadaire sont en moyenne effectuées par EPN », détaille-t-elle en annonçant de nouvelles perspectives. Sa feuille de route prévoit 4 axes : accompagner les publics dans leur appropriation, soutenir l’innovation, la compétitivité et l’attractivité du territoire grâce aux infrastructures, développer une administration tournée vers l’usager, accompagner les collectivités du territoire dans leur transition…
Cette « transition territoriale passe effectivement par l’attractivité du territoire, notamment avec le e-commerce mais cela peut aussi être l’accessibilité aux services avec la couverture numérique, l’environnement avec les mesures de la qualité de l’air ou la propreté, la sécurité… », a confirmé Mélisa Wiro. Pour la directrice de programme Connaissance des territoires du Groupe La Poste, « même si certains ont peur, il faut aller vers l’exploitation de la donnée territoriale » en désilotant les informations pour rendre les territoires plus résilients, que ce soit pour favoriser le déploiement de la fibre optique au domicile, mieux gérer les déchèteries sauvages, entretenir la qualité de la voirie ou encore faire face aux crises sanitaires.
Derrière ces exemples sur la gouvernance des données, la médiation numérique, l'outillage informatique, l’internet des objets se cache l’enjeu d’autonomie opérationnelle des collectivités, gage d'indépendance de leurs choix politiques et démocratiques. Mutualisation des compétences, acculturation de tous, sobriété des moyens devraient prendre toujours plus d’importance à l’avenir pour conserver une certaine souveraineté numérique.