Mises en demeure de l'Arcep : la question prioritaire de la complétude Septembre 2019
L'Arcep a enfin publié, après plusieurs mois d'embargo, les mises en demeure de 3 opérateurs concernant le non respect de l'obligation de complétude des déploiements FttH. Si l'Avicca salue la démarche de l'Autorité, elle en attend néanmoins beaucoup plus s'agissant de ce point essentiel de l'aménagement numérique du territoire.
La complétude en zone d'initiative privée est en effet presqu'aussi rare qu'une sanction du régulateur : 8% seulement des 3 335 communes de l'AMII de 2010/2011 peuvent être considérées comme étant intégralement raccordables ; quant aux 2 443 communes rajoutées depuis 2011 à la zone d'initiative privée, seules 3 d'entre elles respectent, à peu de choses près, l'obligation de complétude !
La recommandation publiée le 28 juillet 2018 était minimaliste en termes de contraintes de complétude pour les opérateurs. Pourtant, l'Autorité a été particulièrement conciliante dans sa première mise en demeure, ne visant que des armoires de rue (PM) comportant un "taux élevé constaté de locaux non raccordables" (comprendre plus de 20%...). Malgré cela, ce sont pratiquement des villes entières comme Aix-en-Provence, Avignon, Belfort, Besançon, Bondy, Le Havre, Le Mans, Reims, Tourcoing, Troyes, Vannes... où les armoires de rue ont très tôt été implantées puis délaissées au profit d'autres déploiements. A croire que les opérateurs ont tenu à donner raison à l'Avicca qui craignait, dès 2011, une stratégie de préemption et d'écrémage...
Le calendrier de la mise en demeure et les délais pour se mettre en conformité pour y répondre constituent à n'en pas douter une bonne affaire en tout cas pour les opérateurs : ils gagnent deux années de plus pour déployer les quartiers raccordables à moins de 80%, en attendant une probable nouvelle mise en demeure pour ceux entre 80 et 90% de raccordables et ainsi de suite... C'est à se demander pourquoi certains d'entre eux s'emportent contre l'Arcep ! La seule "QPC" entendable, c'est bien la question prioritaire de la complétude.
L'Avicca se félicite néanmoins que l'Autorité ait rejeté en bloc les différents prétextes - souvent surprenants - avancés pour expliquer l'absence de complétude. Les RIP parvenant généralement sans trop de difficultés à atteindre ces 100% malgré des contraintes opérationnelles que ne connaissent pas ou peu les opérateurs privés en zone AMII, il n'est aucun argument qui puisse durablement être opposé par ces derniers pour ne pas être au moins aussi performants que les collectivités.
Exiger la complétude ne relève nullement de harcèlement. Il s'agit simplement de respecter ce pourquoi des RIP ont été tenus d'arrêter leurs projets de déploiement, voire leurs déploiements en cours. Il s'agit d'assumer les choix faits et confirmés à maintes reprises par les seuls opérateurs privés, sans aucune pression des collectivités. Il ne sert à rien de se gargariser de chiffres de déploiements, d'objectifs ambitieux, de taux élevés au niveau national si, localement, des habitations, des entreprises et des services publics - fussent-ils des crèches ou des monuments historiques - sont durablement laissés hors d'atteinte.
La question prioritaire de la complétude des déploiements FttH mérite a minima une application stricte et sans concession du cadre actuel. Il s'agit de viser l'ensemble des armoires de rue déployées sans considération du niveau de complétude. Et sauf à vouloir accorder systématiquement aux opérateurs plusieurs années supplémentaires de déploiements sans risquer de sanctions, l'Autorité devra dès à présent user de la mise en demeure préalable plutôt que de réactions a posteriori.
Paris, le 25 septembre 2019
Patrick CHAIZE
Président de l'Avicca