Numérique / Territoires

Motion : Le coût de la montée en débit doit être pris en charge essentiellement au niveau national et non au niveau local Avril 2011

Motion

Les collectivités locales réunies le 4 avril 2011 à l’occasion de l’Assemblée générale de l’AVICCA, ayant pris connaissance des conditions de "montée en débit" sur le réseau cuivre de l’opérateur historique, constatent que :

  • L’évolution des usages des professionnels et du grand public crée une demande légitime d’augmentation des débits disponibles.
  • Le passage au très haut débit sur fibre optique est un chantier étalé sur au moins quinze ans dans le Programme national Très haut débit, et il ne saurait être question de ne rien faire en attendant pour les zones qui ont aujourd’hui des débits insuffisants.
  • L’opérateur de la boucle locale cuivre et les fournisseurs d’accès à internet dégagent des marges positives considérables sur cette activité depuis plusieurs années.
  • L’opérateur de la boucle locale cuivre a la possibilité d’investir dans les zones de son réseau qui ne permettent pas d’assurer aujourd’hui un véritable haut débit, et de répercuter cet investissement sur la totalité des opérateurs utilisant cette boucle nationale, ce qui permettrait une péréquation sur l’ensemble des usagers.
  • Malgré cette possibilité, l’opérateur de la boucle locale cuivre n’a cependant aucun plan pour faire monter en débit le réseau qui lui appartient ; il envisage seulement de faire appel aux subventions des collectivités, et concentre ses intentions d’investissements sur les zones rentables de déploiement de la fibre optique. (1)
  • L’Etat, actionnaire principal de France Télécom, n’envisage pas d’infléchir la stratégie de l’entreprise, ni d’employer les dividendes qu’il reçoit pour aider les collectivités.
  • Le dispositif présenté par l’ARCEP (2) affecte la totalité des coûts d’investissements au demandeur de la montée en débit (collecte, hébergement, modification de la boucle locale, « accompagnement » des opérateurs privés pour leurs DSLAM…), c’est-à-dire en fait aux collectivités.
  • Le coût estimé de la montée en débit, en dehors des zones qui pourraient être fibrées dans les prochaines années, a été estimé de deux à cinq milliards d’euros, suivant les objectifs de débits à atteindre. (3)
  • Le programme national Très haut débit ne prévoit au maximum que deux cent cinquante millions d’euros pour aider les collectivités sur ce sujet, répartis jusqu’en 2017. (4)
  • Le Fonds d’Aménagement Numérique du Territoire, prévu dans la Loi relative à la lutte contre la fracture numérique, est réservé au Très haut débit, et aucune décision n’a été prise quant à son alimentation pérenne. (5)

Les collectivités en déduisent qu’une situation insupportable va s’établir très prochainement :

  • Les élus locaux sont déjà largement interpellés sur ces questions ; ils risquent désormais d’être tenus pour responsables des débits, au motif que les collectivités ont le droit d’agir.
  • Faute d’aides nationales conséquentes, la quasi totalité de la charge financière va incomber aux collectivités qui ont déjà des territoires difficiles à aménager (ruralité, quartiers périphériques des agglomérations…).
  • Les financements locaux à consentir pour l’amélioration du réseau privé ne seront pas affectés à une évolution plus structurelle et pérenne : le Très haut débit en fibre optique jusqu’à l’usager, avec un réseau public.

En conséquence, les collectivités demandent, en mesure transitoire là où il n’est pas possible de passer directement au très haut débit, que la montée en débit soit prise en charge essentiellement au niveau national et non au niveau local.

Pour ce, divers moyens peuvent être employés alternativement, successivement ou en articulation :

  • Décision de France Télécom d’un programme d’investissements massifs dans les zones où les débits ADSL sont insuffisants.
  • Affectation des dividendes de l’Etat actionnaire de France Télécom aux aides aux projets locaux.
  • Séparation structurelle de l’opérateur historique, et constitution d’une entité sous maîtrise publique assurant une transition de la boucle locale cuivre à la boucle locale fibre sans subventions. (6)
  • Régulation différente de la boucle locale cuivre afin d’inciter à l’investissement. (7)
  • Alimentation pérenne du Fonds d’Aménagement Numérique du Territoire ; élargissement de son objet à la montée en débit, ou dégagement de moyens suffisants pour traiter en priorité, en fibre optique jusqu’à l’abonné, les zones où les débits ADSL sont insuffisants.

Les collectivités demandent un débat parlementaire sur les différentes options de financement national de la montée en débit, suivi de décisions rapides, afin que la fracture numérique ne se renforce pas, avec toutes les conséquences induites pour les habitants, services publics et entreprises des territoires concernés.

Paris, le 4 mars 2011

Yves ROME

Président de l’AVICCA

 

(1)  Communiqué de presse du 3 février 2011

(2)  Projet de recommandations de l’ARCEP sur la montée en débit via l’accès à la sous-boucle locale cuivre de France Télécom

(3)  Rapport d’étude sur le déploiement des réseaux très haut débit sur le territoire national, p 21 et 22, publié par la Datar en janvier 2010

(4) Volet C du programme national, via le Fonds national pour la Société Numérique, qui sera accessible dans des conditions non encore précisées.

(5)  Le rapport du sénateur Maurey au Premier ministre, remis en octobre 2010, recommande de dégager 660 millions d’euros/an dès le budget 2012

(6) Il s’agit d’un des scénarios évoqués dans le rapport Datar, basé sur le fait que les excédents de revenus du cuivre pourraient être affectés à la fibre, sans nécessiter de subventions publiques. Ce scénario impliquerait de prendre en compte notamment la dimension sociale d’une telle séparation.

(7)  Le tarif d’utilisation de la boucle locale cuivre (9 euros/mois/abonné) est régulé. La méthode de calcul retenue est celle des coûts courants économiques. L’AFORST a relevé un écart important entre les 800 millions d’euros/an d’investissement qui correspondrait à un flux d’investissement régulier pendant la durée de vie des infrastructures et la réalité des investissements consentis par France Télécom, à savoir environ 400 millions d’euros/an depuis l’année 2000

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